Plan « Action publique 2022 » : une consultation qui passe mal

Plan « Action publique 2022 » : une consultation qui passe mal  Extrait de la gazette des communes Publié le 18/01/2018 Par Ségolène Poinas 

« Mascarade », « simulacre », « dés pipés » : c’est peu de dire que la consultation lancée par le gouvernement sur son plan de transformation de l’action publique a été fraîchement saluée par la CGT, FO ou Solidaires. Ce « Forum de l’action publique » a été initié sur Internet en novembre (et dans les régions, lors de rencontres territoriales), afin de recueillir avis et propositions des usagers et des agents. Pour l’heure, il laisse sceptiques nombre d’élus et professionnels, comme en témoigne le communiqué publié par l’AITF le 19 décembre pour s’étonner de la formulation de certaines questions.

« Consulter sur la réforme et la modernisation de l’action publique est positif, note Patrick Berger, président de l’association. Mais nous nous inquiétons de l’utilisation des résultats, quand certaines questions sont pour le moins orientées. » En cause, les questions portant sur les missions du service public qui ne « répondr[aient] plus aux besoins de la société » et sur celles qui pourraient « être confiées à d’autres acteurs de la société (entreprises, associations, citoyens) ». Pour l’AITF, ces libellés trahissent des projets de privatisation. « Cette démarche ne permet pas d’analyser finement la notion d’intérêt général, ni la diversité des besoins selon les territoires, insiste Patrick Berger. On ne peut pas traiter ces questions à l’échelle nationale de façon rigide : il faut laisser aux collectivités la liberté de choisir les bons moyens d’exercer les missions de service public. » Et de rappeler qu’en la matière les doctrines évoluent au fil du temps comme le prouve l’histoire de la gestion de l’eau.

Focus Un comité d’experts pour formuler des propositions
Lancé par le Premier ministre le 13 octobre 2017 et placé sous l’autorité du ministre de l’Action et des comptes publics, le plan « Action publique 2022 » se veut un vaste chantier destiné à réviser les missions du service public dans un cadre de contraintes budgétaires renforcées. La phase de consultation et de réflexion préparatoire, entamée en novembre, doit s’achever en mars 2018.

Outre la consultation en ligne des usagers et des agents, et les forums régionaux, le gouvernement a mis en place un Comité action publique 2022 (CAP 22), chargé de rédiger un rapport durant le premier trimestre 2018. Sa composition – 34 personnalités, élus, hauts fonctionnaires, dirigeants d’entreprises, économistes – est critiquée par les syndicats et représentants des agents, qui en sont absents.

Faire entendre toutes les voix
L’AITF, comme d’autres associations professionnelles territoriales, s’étonne de ne pas être associée aux réflexions du gouvernement. Les ingénieurs ont écrit au ministre Darmanin afin de faire entendre leur voix et leur expertise. Courrier sans réponse à la mi-janvier.

« On a le sentiment que tout ceci est brouillon et fait très rapidement, relève Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Il faut engager une réflexion de fond sur le périmètre des services publics, et ne pas réduire le débat aux questions budgétaires. On peut envisager une part d’externalisation, mais à condition de conserver une expertise interne aux collectivités. Sinon, on se prive du savoir-faire nécessaire au contrôle. » Pour le maire de Sceaux et secrétaire général de l’AMF, cette consultation traduirait une volonté de reprise en main de l’État sur les finances locales, quand les missions déléguées aux collectivités, elles, ne cessent d’enfler. Une contradiction qu’il dénonce au sein du Comité Action publique 2022, où il siège comme représentant des maires de France. « Le CSFPT, lui, espère être sollicité avant la rédaction du projet de loi. » À suivre.

Extrait de la gazette des communes Publié le 18/01/2018 Par Ségolène Poinas